Idées d'architecte / 30.01.2017

La mort des communes a déjà eu lieu.

Les communes françaises ont disparu le 25 octobre 2016 mais chut : c’est un secret.

On appelle ça l’effet TGV : la propension de nos représentants nationaux, députés et sénateurs, à se placer en défenseurs de la ruralité depuis les territoires et à prendre des décisions contraires à ces principes une fois rendus à Paris. C’est ce qu’il est advenu le 25 octobre dernier. Ce jour-là, dans une belle communion de pensée, députés de droite et de gauche ont adopté en seconde lecture un projet de loi portant sur « l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes » (saveur du sous-titre) qui complétaient des mesures déjà adoptées en mars 2015. Une loi qui Institue le statut de « commune déléguée ». Quézako ? Hé bien, la commune déléguée, c’est ce qu’il restera d’une commune quand celle-ci sera morte aura été fusionnée avec ses communes limitrophes. Pour que les choses se passent en douceur, voire même, à l’insu des premiers concernés, le statut de commune déléguée permettra de prolonger l’ancienne commune, son nom, son conseil municipal, son maire et leurs indemnités. Mais ne nous y trompons pas : seule la commune nouvelle issue du regroupement aura statut de collectivité territoriale. A quoi servira le conseil municipal de la commune déléguée ? Franchement, j’ai bien cherché dans le texte de loi, je n’ai pas trouvé. La seule réponse est : endormir la vigilance de ses habitants.

Alors je veux bien admettre que 36 000 communes, c’est trop. Quoique : à quoi sert-il de regrouper les communes depuis que la hiérarchie territoriale a tant renforcé la communauté de communes que celle-ci est devenue l’unité territoriale de fait ? Et la fusion des Régions aurait permis des économies tellement exemplaires qu’il y avait urgence à fusionner des communes dans un même mouvement ? Inéluctablement, la fermeture de mairies fera reculer encore l’égalité des français devant le service au public (les points postes, vous vous souvenez ?) et favorisera le mouvement de délaissement de territoires déjà peu favorisés. Mais nos députés et sénateurs doivent savoir ce qu’ils font : ils sont presque tous d’accord et « vont à la rencontre des français ».

Pourtant, les conseils municipaux sont de formidables viviers d’engagement citoyen. Plutôt que s’en détourner, la France devrait s’appuyer sur l’énergie de ces hommes et des femmes qui luttent au quotidien pour assurer la survie de leurs communes, inventer la campagne de demain et rééquilibrer la balance des territoires. Mais nos députés et sénateurs pensent probablement que la démocratie locale tirera meilleur profit d’un citoyen sans engagement.

Lorsqu’on prend des décisions qui impactent à ce point la vie des gens, alors-même que ceux-ci ne vous ont pas donné mandat pour prendre ce genre de décision, la moindre des choses c’est d’aller « à la rencontre des français », prendre le risque et avoir le courage d’expliquer et de tenter de convaincre ; et que si vous ne convainquez pas, c’est qu’il y a un loup.  Une action politique qui cache son but derrière un paravent ne peut que favoriser la rancœur, la frustration, le populisme.

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